La sortie de l'album approche, nous commençons à ressentir un petit trac...
Nous sommes quand même rassurés, de nombreuses dates sont au programme. Cela nous promet une belle année 2010.
Beaucoup de concerts sont prévus avec un section de cuivre, composée de deux trompettistes, Michel Delage et Laurent Agnès,
un Saxophoniste, Pascal Faidy et un trombone, Marc Antony. Ce sont quatre musiciens rencontrés par l'intermédiaire de Manu, originaires comme lui de la région Poitou-Charente, et avec qui nous
avons déjà donné plusieurs concerts (Saint Jean De Maurienne, Festival Interceltique, Nuits de nacre à Tulle...).
Nous trouvons que le mélange Cardell/Cuivres est vraiment intéressant, car il souligne le coté festif de notre musique, mais apporte aussi une certaine rigueur dans notre jeu imposée par les
arrangements de Michel Delage. Ceux-ci s'intègrent dans les chansons de façon très naturelle, restent dicrets pour respecter les mélodies et le chant. Lorsque nous envoyons toute la puissance,
cela donne un vrai coté Big Band très grisant.
Je vais donc aujourd'hui, vous parler de la chanson "Si je cale, je coule"
Pour celle ci nous recherchions un gimmick rythmique très rapide, et avons développé une suite harmonique avec de nombreux accords, pour trouver une mélodie originale.
maquette
J'avais une idée de texte liée à une anecdote contée par un couple d'amis marins.
Mouillant près de Guernesey, leur bateau se mit à chasser sur son ancre en pleine nuit suite à un coup de vent soudain.
réveillés par le grain, les deux équipiers se lèvent, montent sur le pont et aperçoivent à six brasses du bateau un énorme rocher.
Ils décident de lever l'ancre en catastrophe et de démarrer le moteur, il est impossible de mettre les voiles en si peu de temps.
Le moulin est un peu vieux et n'a pas tourné depuis longtemps. Il démarre, ouf!, le patron s'adresse à son équipier occupé à soulager le grappin et lui crie : "Là si on cale on coule."
Je note donc ça dans un coin, et le chante en répé. On se dit que ça colle bien, j'écris un texte en jouant sur les allitérations et les jeux de mots. Il conte l'angoisse des clandestins
cherchant à fuir dans des embarcations de fortune. Quand on est issu d'un milieu rural, où beaucoup de nos anciens ont fui pour pouvoir échapper à la misère, se sont rendus dans les villes
occuper des métiers souvent pénibles, ont connu les premières banlieues de Saint Denis ou autres au début du siècle dernier et nous ont inévitablement transmis cet héritage, on se rend
compte que peu de choses ont changé...
En travaillant sur la chanson, nous avons ralenti le tempo et donné une couleur très jazz aux arrangements.
Dans les années d'entre deux guerres, les orchestres appelés Jaz, avec un seul Z étaient très répandus en Bretagne.
Le jaz ou jâse, c'est la grosse caisse de la batterie. Je dis Jaz car j'avais vu une vieille photo d'un groupe de mon village s'appelant le "Lapic Jaz band" du nom d'une impasse menant au
ruisseau du même nom à Locquirec.
Ces orchestres jouaient dans les noces et animaient des bals où ils interprétaient des airs à la mode, mais aussi des gavottes et airs du pays.
Le Richard CoÏc Jazz band au café de Bretagne à Quimper,
premier orchestre a enregistrer en 1936, une suite de gavotte
de l'Aven avec ce type de formation.
(Source : Musique Bretonne, éditions Chasse Marée/Ar Men)
Si la musique traditionnelle reste vivante, elle le doit bien sur à la transmission orale, au collectage sonore, mais aussi à tous ces croisements de musique, d'instruments de personnes qui ont
su lui conserver sa dimension sociale. Dan ar Braz explique par exemple très bien, l'importance des bals Rock à la fin des années soixante et début des années soixante dix, leur coté formateur
pour toute une génération de musiciens.
Je vous invite à écouter le travail de Roland Becker et Régis Huiban.
Jean Michel a donc composé une mélodie de gavotte dans l'esprit années 30. Nous explorons un genre musical qui trouve sa source sur les bords de l'Odet, c'est assez cocasse.
Si je cale je coule (extrait)
A Bientôt